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Comprendre la dette odieuse

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Message par Admin Jeu 29 Déc - 18:02

Comprendre la dette odieuse
1/ La dette des pays du Sud
- La dette : histoire d’une crise
- Illégitimité de la dette

2/ La dette odieuse, qu’est-ce que c’est ?
- Une doctrine de droit
- 3 critères pour définir la dette odieuse
- Une dette de dictateurs
- Combien représente la dette odieuse ?

3/ Peut-on annuler les dettes odieuses ?
- Des pays montrent l’exemple
- La jurisprudence
- Qui doit payer la dette odieuse ?

4/ Pourquoi faut-il annuler les dettes odieuses ?
- Abroger la double peine
- Reconnaître la responsabilité des créanciers
- Prévenir de nouveaux prêts odieux

La dette des pays du Sud

La dette : histoire d’une crise

Les pays du Sud s’endettent dans les années 60-70 pour financer leur développement. Le contexte économique et politique international y est favorable. D’une part la guerre froide pousse les blocs occidentaux et soviétiques à « acheter » le soutien des pays du Sud en leur prêtant massivement de l’argent, quitte à financer des régimes despotiques dans certains pays. D’autre part, après le choc pétrolier de 1973, les banques occidentales regorgent de « pétrodollars » et proposent des taux d’intérêt particulièrement bas. Entre 1970 et 1980, la dette des pays en développement est multipliée par 12.

Mais à la fin des années 70, l’augmentation brutale des taux d’intérêts mondiaux et la chute du prix des matières premières plongent les pays du Sud dans une situation économique intenable. Le 1er facteur augmente considérablement le coût des emprunts contractés ; le 2ème diminue les recettes qu’ils peuvent consacrer au remboursement. C’est le début d’une spirale infernale pour ces pays, contraints de contracter de nouveaux prêts pour rembourser les premiers. Ce phénomène aboutit en 1982 à l’annonce par le Mexique de sa situation de cessation de paiement. De nombreux pays suivront. Les plans drastiques imposés par le FMI et la Banque mondiale provoqueront une crise sociale, sans pour autant résoudre la crise financière. En 1999 puis 2005, les pays du G8 promettent d’effacer la dette des pays les plus pauvres. A ce jour, seule une vingtaine de pays sont concernés. Environ 4% de la dette extérieure publique des pays en développement a été effacé.

Illégitimité de la dette

Seule une faible part des prêts accordés aux pays du Sud a bénéficié aux populations. La majorité a servi à renforcer des régimes despotiques et corrompus ou à financer des projets inadaptés et surfacturés. Par exemple la centrale nucléaire de Bataan aux Philippines, qui est à l’origine de la plus importante dette du pays. Achevée en 1984, pour un coût de 2,3 milliards $, elle n’a jamais été mise en service car elle a été construite sur une faille géologique au pied d’un volcan. Les créanciers continuent tous de percevoir le remboursement des Philippines.

La notion d’illégitimité constitue une appréciation morale ou politique : elle n’a pas de définition en droit. Elle a été utilisée cependant en 2000, par la cour fédérale argentine pour qualifier la dette contractée par le régime dictatorial de 1976 à 1983. Plus récemment, le gouvernement norvégien l’a utilisé pour renoncer au remboursement de certaines de ses créances. On peut définir une dette illégitime comme contraire à la loi ou à la politique publique, injuste, inadaptée ou abusive.

> Cliquez ICI pour en savoir plus sur l'illégitimité de la dette, la décision norvégienne, etc.

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La dette odieuse, qu’est-ce que c’est ?

Une doctrine de droit

La dette odieuse est une doctrine de droit, théorisée en 1927 par Alexander Sack, ancien ministre russe de Nicolas II et professeur de droit à Paris. Selon lui, « si un pouvoir despotique contracte une dette non pas pour les besoins et dans les intérêts de l’Etat, mais pour fortifier son régime despotique, pour réprimer la population qui le combat, etc., cette dette est odieuse pour la population de l’Etat entier. Cette dette n’est pas obligatoire pour la nation ; c’est une dette de régime, dette personnelle du pouvoir qui l’a contractée, par conséquent elle tombe avec la chute de ce pouvoir. »

Cette doctrine cherche à formaliser la responsabilité des créanciers. Si ceux-ci connaissent les desseins de l’emprunteur, ils commettent « un acte hostile à l’égard du peuple » et s’exposent eux-mêmes au risque de non-remboursement si le régime est déchu. Ils ne peuvent donc réclamer leur dû. Certains préfèrent parler de « prêts odieux » plutôt que de « dette odieuse » pour insister sur la responsabilité des créanciers.
3 critères pour définir une dette odieuse

De nombreux auteurs ont cherché à rendre la doctrine de la dette odieuse opérationnelle au niveau juridique. La forme la plus aboutie définit une dette odieuse par la concordance de trois critères :

> Absence de consentement : la dette a été contractée contre la volonté du peuple.

> Absence de bénéfice : les fonds ont été dépensés de façon contraire aux intérêts de la population.

> Connaissance des intentions de l’emprunteur par les créanciers.

Si l’un des critères n’est pas respecté, on ne peut pas parler de dette odieuse. Il en est ainsi d’une dette utilisée par un despote pour construire des hôpitaux ou de créances détournées par un régime démocratique. On pourra débattre de leur caractère illégitime, mais non les définir comme odieuses.

Une dette de dictateurs
Les dettes odieuses sont généralement associées à des régimes dictatoriaux comme celui de Gnassingbé Eyadema au Togo, de Ferdinand Marcos aux Philippines, du régime de l’apartheid en Afrique du Sud, des juntes en Amérique latine ou encore de Saddam Hussein en Irak. Ces régimes liberticides ont tous contracté des dettes colossales auprès de pays et institutions internationales avertis, à des fins éloignées de l’intérêt de leur population. La doctrine de la dette odieuse aurait ainsi pu servir de fondement au Rwanda pour répudier la dette extérieure contractée par le régime responsable du génocide de 1994.
Combien représente la dette odieuse ?

Le montant de la dette odieuse est, par essence, malaisé à estimer. On se fie donc généralement à la dette contractée par des régimes dictatoriaux. Celle-ci est estimée entre 500 et 800 milliards $, soit 20 à 30 % de la dette totale des pays du Sud. La vente d’armes représente une part importante de ces dettes odieuses. Dans les années 80, les achats d’armes représentaient 15 à 20 % de la dette globale des pays du Sud. La France figure, à cette période, parmi les principaux fournisseurs. Les avoirs détenus à l'étranger par les dictateurs du Sud, eux, sont estimés entre 100 et 180 milliards $ (cf. l'étude du CCFD).

Dette attribuable à quelques dictateurs (en milliards $)


Indonésie
Suharto 126
Brésil Junte 100
Argentine
Junte 65
Philippines Marcos 40
Syrie
Assad 22
Afrique du Sud
Apartheid
22
Pakistan Junte
14
Soudan
Nimery/al-Mahdi
17
Thaïlande
Junte
14
Nigeria
Buhari/Abacha
14
Chili
Pinochet
13
Zaïre/ RDCongo Mobutu
13
Algérie
Junte
5
Iran
Shah
5
Kenya Moi 4
Ethiopie
Mengistu 4
Bolivie
Junte
3
Somalie
Siad Barre
2
Paraguay
Stroessner
2
Malawi
Banda
2
Salvador
Junte
1
Libéria
Doe
1
Haïti
Duvalier
1

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Peut-on annuler les dettes odieuses ?
Des pays montrent l’exemple

La doctrine de la dette odieuse introduit une exception au principe de succession d’Etat, selon lequel tout gouvernement est légalement tenu de payer la dette héritée du gouvernement précédent. Mais plusieurs régimes, dont certaines puissances occidentales, ont déjà refusé d’honorer les engagements financiers de leurs prédécesseurs, invoquant le caractère odieux de la dette.

C’est le cas de la France qui, en 1878, a refusé d’assumer la dette de Madagascar après avoir annexé la Grande Ile. C’est également le cas des Etats-Unis et de Cuba deux décennies plus tard. En 1897, soutenant le peuple cubain et soucieux de leurs propres intérêts, les Etats-Unis entrent en guerre contre la couronne hispanique et obtiennent la souveraineté de l’île. L’Espagne, déchue, leur réclama le paiement des créances qu’elle détenait sur le peuple cubain. Selon les Etats-Unis, cette dette, imposée par la force des armes, constituait l’un des motifs de la rébellion cubaine. Ils déclarèrent que les créanciers devaient assumer les risques qu’ils avaient pris, en utilisant ces créances pour asservir un peuple. Ni les Etats-Unis ni Cuba ne remboursèrent la dette.

Plus récemment, le cas de l’Irak a ravivé la rhétorique de la dette odieuse. Pressés de rendre solvable la nouvelle autorité irakienne pour financer la reconstruction, les Etats-Unis demandent l‘annulation totale de la dette irakienne. Selon le Secrétaire américain au Trésor John Snow, « le peuple irakien ne doit pas être accablé par des dettes contractées par le régime du dictateur déchu ». Puis, craignant de créer un précédent, ils obtiennent des principaux créanciers, en novembre 2004, une annulation de 80 % de la dette irakienne sans référence à son caractère odieux.

En octobre 2006, c’est la Norvège qui a créé un précédent historique en annulant 65 millions d’euros de créances, qu’elle a reconnues comme illégitimes, envers 5 pays (Egypte, Equateur, Jamaïque, Pérou et Sierra Leone). Depuis, la Norvège a saisi la CNUCED (organe de l’ONU) et la Banque mondiale pour affiner le concept de dette odieuse et inciter d’autres prêteurs à assumer leurs responsabilités.
La jurisprudence

D’un point de vue strictement juridique, l’affaire entre le Costa Rica et la Grande-Bretagne constitue le principal élément de jurisprudence. En 1922, le Costa Rica dénonça la dette accumulée par le dictateur Tinoco (1917-1919). La Grande-Bretagne accusa l’Etat costaricain de rompre ses engagements envers la banque britannique Royal Bank of Canada. Le président de la Cour suprême américaine rejeta la prétention britannique, mettant en cause sa bonne foi et arguant qu’elle aurait dû « démontrer qu’elle a fourni l’argent au gouvernement pour un usage véritablement légitime. »

Plus récemment, la sentence, prononcée par la Cour pénale de Buenos Aires en 2000 est également un élément de jurisprudence important. Au terme d’un processus d’audit judiciaire, la légitimité de la dette argentine est mise en cause. La Cour condamne fermement la dictature argentine et ses créanciers, dont les banques privées et le Fonds monétaire international.

Cependant aujourd’hui, la doctrine de la dette odieuse n’est pas opposable aux créanciers : une doctrine n’ayant pas valeur de loi. Elle n’est qu’une source subsidiaire du droit. Cependant, les différents pays ayant invoqué avec succès la doctrine et les arbitrages qui ont été adoptés pourraient en faire une base pour la pratique du droit.


Qui doit payer la dette odieuse ?

Deux interprétations sont possibles. Si le contrat est jugé nul et non avenu, le poids de la dette retombe alors sur le créancier ; si on estime que le contrat ne lie pas le créancier à l’Etat mais au régime déchu, il appartient aux anciens dirigeants d’honorer ces dettes à titre privé.
Pour les créanciers, s’attaquer à la fortune amassée dans les pays occidentaux par les clans Mobutu (environ 6 milliards $), Marcos (10 milliards $) ou Suharto (environ 25 milliards $) ne serait pas un vain exercice. Non seulement la restitution de ces biens mal acquis représente un enjeu financier important, mais elle enverrait un signe très fort contre l'impunité. Mais la question se pose pour les entreprises et individus des pays du Nord qui ont bénéficié en connaissance de cause de ces créances odieuses. Dans les cas fréquents de prêts à des régimes autoritaires, destinés à promouvoir les exportations du pays prêteur ou pour des projets somptuaires accompagnés de généreux pots-de-vin et de rétro-commissions, les contribuables sont en droit de protester contre l’utilisation faite de l’argent public et de réclamer que les bénéficiaires complices de tels montages paient le prix de leurs forfaits.

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Pourquoi faut-il annuler les dettes odieuses ?

Abroger la double peine des populations

Il n’est pas acceptable de faire payer à des populations le prix de leur oppression. Ces populations ont subi la répression de régimes despotiques ; elles assument aujourd’hui le remboursement d’une dette, accumulée par ces derniers. Tout en étant les premières victimes des conditionnalités économiques drastiques imposées par le Fonds monétaire international, en contrepartie d’annulations ponctuelles de dettes. Il s’agit de rendre justice à des peuples qui héritent aujourd’hui de contrats d’endettement illégitimes ou illégaux.

Reconnaître la responsabilité des créanciers

Les créanciers portent une lourde responsabilité dans l’accumulation des dettes odieuses. Les pays occidentaux ont soutenu des régimes qu’ils savaient liberticides, liant leur soutien politique et financier à de juteux contrats commerciaux et au ralliement politique de ces pays. A travers l’annulation des dettes odieuses, il s’agit pour les pays riches d’en admettre le caractère illégitime, de reconnaître leur responsabilité et d’assumer le coût de leur politique passée.

Prévenir de nouveaux prêts odieux

L’annulation des dettes odieuses devrait jouer en faveur d’un meilleur discernement de la part des Etats et des organismes créditeurs dans l’octroi de nouveaux prêts, les encourageant à des pratiques responsables et transparentes. Elle permettrait de mettre un terme au système actuel qui garantit l’absence de risque pour les prêteurs, ces derniers étant assurés de recouvrer leurs créances, aussi scandaleuses et illégitimes soient-elles. Les créanciers ne s’engageront pas à octroyer des prêts dont ils savent qu’ils ne seront pas remboursés.

http://www.detteodieuse.org/la-dette-odieuse-cest-quoi.php#detteodieuse

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